Les Dolmens - Trikuharriak

Dès la fin du Néolithique, puis au Cuivre et au Bronze, l’inhumation des défunts, en Pays Basque sera pratiquée soit dans des grottes dites « sépulcrales », soit dans une construction nouvelle, le dolmen (en Basque trikuharri soit la pierre des Autrigons). Le mot dolmen, d'origine bretonne, est constitué des termes dol (ou daol, taol) qui veut dire table, et men (ou maen) qui signifie pierre.

Les plus anciennes architectures mégalithiques d’Europe ont été érigées fin 5ème millénaire, début 4ème. Leur répartition côtière est évidente : sud de l’Espagne, Portugal, Bretagne, sud de l’Angleterre, Danemark, toutes les régions dynamiques, ouvertes sur le monde terrestre et maritime.

Le dolmen de Gasteenia (Gasteynia) à Mendive
En Pays basque, les plus anciens monuments semblent apparus aux environs du 4ème millénaire, par acculturation plus que par des mouvements de peuples, sous des influences venues, semble t-il, du Portugal et du sud de la Péninsule Ibérique.

Le monument mégalithique, première ébauche d’architecture, est aussi le premier signe de la volonté et de la capacité de l’homme à bâtir avec le souci de la durabilité. Compte tenu de la somme des efforts parfois exigée, la nécessité d’une main d’œuvre, d’une autorité et d’un consensus apparaît là encore, tout à fait évidente.

Le dolmen de Gasteenia (Gasteynia) à Mendive
Il s’agit d’un monument sépulcral pouvant contenir un ou plusieurs cadavres et susceptible d’être réutilisé plusieurs fois. 

Le dolmen d'Ithe I à Aussurucq
Le dolmen est constitué de grandes dalles plantées dans le sol délimitant une chambre funéraire dont l’axe est souvent orientée vers l’Est, la dalle côté E. pouvant être absente ou beaucoup moins importante.

Ceci permettait l’introduction ultérieure d’autres cadavres, souvent disposés la tête regardant le soleil levant.

Le dolmen d'Ithe I à Aussurucq
Sur les montants, repose une toiture ou table dolménique. L’ensemble était recouvert d’un monticule de terre ou de pierres, le tumulus, pouvant servir de plan incliné pour traîner sur des rouleaux (troncs d’arbres), la parfois très lourde dalle de couverture.

Iraty au col de Bagargi sur la commune de Larrau coffre de tradition dolménique de l'Âge du bronze ancien.

Iraty au col de Bagargi sur la commune de Larrau coffre de tradition dolménique de l'Âge du bronze ancien.

Le col de Bagargi (Larrau) on aperçoit sur la gauche du chalet le tumulus du dolmen.
Dans tous les cas, en Pays Basque, sauf très rares exceptions, le lieu choisi, à proximité d’une ou plusieurs pistes pastorales, jouit d’une vue grandiose et dégagée à l’E.

Dolmen d'Errintzu (commune d'Urrugne) face à La Rhune.
Le renouvellement perpétuel de la vie était une constatation journalière pour pasteurs et agriculteurs, la mort apparaissait comme un mal à combattre par des rites appropriés, et l’inhumation d’un cadavre était assimilable au dépôt d’une graine en terre, condition indispensable à sa renaissance. De même l’orientation des cadavres vers le soleil levant, symbole de renouveau triomphe de la lumière sur les ténèbres de la mort, ainsi que la poudre ocre, couleur de sang, et signe de vie, dont on recouvrait parfois les corps ou les ossements, montre bien une espérance en l’au-delà, dans le renouveau d’une vie future.

Au pied de l'Atxuria le dolmen de Soroaundi (Navarre)
Il convient de remarquer que les dimensions du sépulcre, et de son tumulus, sont conditionnés par des facteurs rituels, mais aussi socio-économiques et démographiques ; mais à son tour, la dimension peut, à elle seule, conditionner le type architectural. En Pays Basque Nord, le trait dominant du mégalithisme est sa simplicité et, dans l’ensemble, la modicité de ses dimensions.

Dolmen sur les flancs de l'Ibanteli à Sare
Il s’agit en effet souvent d’un mégalithisme de montagne, adopté et adapté par des montagnards ; la mort dans ces zones peut être un événement inopiné, et la tombe sera alors construite par un petit groupe d’agro-pasteurs ne pouvant se livrer à des travaux colossaux.
Coffret dolménique d'Altsaan sur la commune de Sare.

Quant au mobilier, il est en général fort pauvre. Les nombreuses fouilles clandestines à la recherche d’hypothétiques « trésors » ont rendu bien difficile le recueil des modestes offrandes ; fragments de céramique, quelques boutons en os, petits grattoirs en silex, quelques rares objets en cuivre et en bronze.

Le dolmen Atermin sur la commune de Sare
Dans la tradition orale basque les dolmens étaient considérés la plupart du temps comme des sépultures, qu’il s’agisse de « Jentils » (hommes sauvages doués d’une grande force) ou de « Mairus » (païens de l’anciens Temps), ils peuvent être aussi considérés comme des maisons (Jentiletxe, Mairietxe), et leur construction est souvent rapportée d’une manière mythique et fabuleuse J M de Barrandiaran a recueilli de nombreuses légendes, auprès de bergers, les seuls à avoir conservé jusqu’à nos jours quelques souvenirs de ces traditions.

Une légende raconte la disparition des Jentilak. Ils virent un jour une étrange lueur dans le ciel. Ils ne connaissaient pas cette lumière et allèrent chercher le plus ancien et le plus sage d'entre eux. Lorsque les yeux fatigués de celui-ci analysèrent le phénomène, il leur dit : « Kixmi est né, la fin de notre race est arrivée. Jetez moi dans le précipice proche ». Tous les jentilak se mirent à courir vers un dolmens pour se cacher au fond de la terre. 

La présence de légendes identiques sur le fond, dans les Pyrénées centrales, est un des témoignages de l'extension ancienne de la culture basque.
Cette légende de la mythologie basque est également rattaché à Olentzero (Selon Jean-Baptiste Orpustan et Michel Morvan, à partir de on "bon", antz "vers" et aro "période de temps, époque".) 

 la principale raison de voir Olentzero le sale et grossier charbonnier descendre dans les villages basques vient d'une légende qui dit que ce personnage vient annoncer la naissance de Kixmi (le singe), Jésus, qui provoqua la disparition subite des Jentilak. Et il annonce une grande nouvelle : le Soleil est plus fort que la nuit ! Olentzero désigne un moment précis de l’année ; le solstice d’hiver.

Le massif de l'Artzamendi lieu d'une intense activité pastorale comme le rappelle sa grande densité en vestiges protohistoriques.
Nous ne terminerons pas ce chapitre sur le rite d’inhumation sans rappeler qu’il fut aussi pratiqué dans des grottes « sépulcrales » ; on en compte environ 230 pour la totalité du Pays Basque. Elles ont pu servir pour des inhumations individuelles, ou collectives le plus souvent ; leur plus ancienne utilisation remonte au Néolithique, avec usage maximum au Cuivre et au bronze final et à l’âge du Fer. Comme dans les dolmens, on y a enterré des individus de tous âges, et des 2 sexes. Il existe une relation entre sépultures en grottes, et en dolmens : les deux traditions coexistent dans le temps, et même souvent dans l’espace, mais on ignore toujours les raison qui faisaient choisir l’un ou l’autre mode à un moment donné….

Le dolmen de Gasteenia (Gasteynia) à Mendive


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